Saint-Valentin : Gros plan sur les premières dames malgaches
La culture politique, à des nuances près, de la « Première Dame » a toujours existé à Madagascar. Elle remonte au temps des royaumes mêmes. Les Premières, à leurs façons et à leur époque, ont influencé de peu ou de loin notre histoire. Chronique.
Les historiens vous diront que la société malgache est presque matriarcale dans bien nombre d’exemple. Que d’histoires d’amour. Que d’intrigues de Palais pour ne citer que les folles nuits d’amour de Rainilaiarivony, Premier ministre, à la fois chaud lapin et grand manœuvrier politique pour avoir épousé successivement les reines Rasoherina, Ranavalona II et Ranavalona III.
Et que dire de Ranavalona 1ère, la régente despotique qui détestait les Européens et la culture occidentale, y compris le christianisme. Elle avait âprement défendu les coutumes locales mais, ô Saint Valentin, elle avait fait de Jean Laborde, son « fou – amoureux », une exception… Un amour passionnel avec un aventurier. Au bout du compte, ces incartades amoureuses ont contribué à la construction de l’histoire de Madagascar. Le haut fourneau de Mantasoa symbolise ces feux de l’Amour interdit.
L’histoire contemporaine de Madagascar est inséparable de la Première Dame. Justine Tsiranana, épouse du premier Président malgache, était toujours aux côtés de son mari. Elle épousa Philibert Tsiranana à l’âge de 15 ans, en 1933. Le couple présidentiel a eu 8 enfants. Pas mal. Durant le mandat de son mari, Justine Tsiranana s’était lancée dans le caritatif, l’aide aux enfants et aux écoliers. Elle a l’habitude de recevoir au Palais de Mahazoarivo, palais présidentiel à l’époque, les élèves méritants. En 1971, elle était allée jusqu’à inviter 5000 écoliers majors (Ndla : j’en faisais partie, en toute modestie. Ce fut un rêve et une grande joie pour nous d’être embrassés sur les deux joues par la Première Dame. Je réclamais à ma mère le droit de ne pas laver mes joues pendant une semaine…)
Notre histoire contemporaine a été mouvementée
La première dame suivante s’appelait Marcelle Larguier. C’était la femme du Général Gabriel Ramanantsoa à qui Philibert Tsiranana avait remis le pouvoir en 1972 après les événements sanglants du 13 mai. De nationalité française, la première Dame ne pouvait qu’être discrète vu que les événements politiques étaient des plus chauds à l’époque. L’histoire ne la connut pas. Elle ne serait pas la seule. Notre histoire contemporaine a été tellement mouvementée que les épouses des Généraux Richard Ratsimandrava, 6 jours à la présidence, puis mort assassiné, le court passage également du Général Gilles Andriamahazo à la tête de l’Etat n’ont pas permis aux Premières Dames de se montrer.
Avec la révolution socialiste et l’Amiral Didier Ratsiraka comme timonier, la Première Dame joua un rôle de premier plan. Céline Ratsiraka née Velonjara. Son père étant un des ténors du Padesm. Céline Ratsiraka a exercé sa fonction de Première Dame avec conviction pour soutenir son mari et le parti Arema. Son mari était revenu au pouvoir après l’exil en France. Mais malade, elle n’avait pas pu ré-exercer son rôle de Première dame. Crainte et respectée, Céline Ratsiraka était un personnage influent dans le régime socialiste.
Thérèse Zafy lui succédait. C’est la femme du Président Zafy Albert. Energique, volontaire elle a joué pleinement son rôle de Première Dame. Elle s’était lancée également dans les actions caritatives. Et elle était toujours au front aux côtés de son baroudeur de mari.
Mais qui est l’épouse de Norbert Lala Ratsirahonana ? Cet homme influent, faiseur et défaiseur de rois, fut chef d’Etat par ses… bons offices après l’empêchement de Zafy Albert. Peut-être parce que son mari est trop occupé à manœuvrer que son épouse avait préféré, elle aussi, la discrétion.
Mère de famille et épouse de Président
Et « Neny » fut. Si elle n’existait pas, Marc Ravalomanana l’aurait inventée. Lalao Ravalomanana a remis à l’honneur le rôle de la Première Dame. On la voyait dans les œuvres de charité, aux côtés des associations de femmes. A la tête de son propre business. Le mari avait un forte personnalité, mais la femme était un fort personnage. A preuve, le mari est en exil. Elle a su manœuvrer pour louvoyer entre la politique et le social, donnant l’image d’une mère de famille qui ne perd pas l’espoir de retrouver le poste de Première Dame que lui avait ravi Mialy Rajoelina.
Fut-elle la cerise sur le gâteau de la Transition ? C’était la Première Dame la plus jeune et pétillante de l’Afrique. Mialy Rajoelina avait créé l’association «Fitia» pour les œuvres sociales. Son rêve a duré 5 ans. Elle a dû céder la place à Voahangy Rajaonarimampianina. La Première Dame, en ce moment, c’est elle. « Les 10% de mon score, je les lui dois», avait confié le Président de la République. On a vu la Première Dame participer à une conférence sur le paludisme et le Sida à Addis-Abeba, venir en aide aux victimes de l’attentat d’Anosikely. Ou encore soutenir l’équipe de football de la CNaPS Sport…
Vieux couple, jeune couple, couple mature… La vie privée de nos couples présidentiels ne figure pas dans les priorités des colonnes des journaux malgaches. Pas comme en Occident, où les médias guettent les moindres faits et gestes des leurs. La séparation du couple Hollande / Trierweiler a, par exemple, alimenté la Une des médias. Il s’en est fallu d’une rumeur sur une liaison Obama/ Beyoncé pour que des passions médiatiques se déchaînent. Mais ce ne fut justement qu’une rumeur.
Le poste de Première Dame est honorifique. Elle n’a pas de pouvoir régalien. Elle a mieux. Le pouvoir de l’oreiller et ses confidences. Monsieur, dites-moi qui vous avez épousée et je dirais qui vous êtes…
E.A
