Sauver Air Madagascar qui est le porte-fanion national, c’est le leitmotiv qui a toujours animé Eric Koller, président du Conseil d’Administration de cette compagnie. Des étapes considérables ont été réalisées depuis la signature du partenariat stratégique avec Air Austral mais Air Madagascar n’est pas à l’abri des zones de turbulences.
Ethiopian Airlines, vol sans autorisation, litige commercial… constituent autant de sujets sur lesquels Eric Koller, président du Conseil d’Administration d’Air Madagascar a bien voulu livrer son opinion au cours d’une interview exclusive accordée à la rédaction. Les détails.
MA-Laza: Un vol de la compagnie Ethiopian Airlines du 11 janvier dernier suscite des polémiques dans le transport aérien. En tant que PCA d’Air Madagascar, qu’en pensez-vous?
Eric Koller: Nous avons négocié avec l’Etat malgache que les vols d’Ethiopian Airlines se limitent à quatre rotations sur Tana et trois sur Nosy-be. Aujourd’hui on a toujours une cinquième fréquence qui arrive. Vendredi dernier, comme vous l’avez constaté dans les journaux, la cinquième fréquence est arrivée sans autorisation de vol au départ d’Addis-Abeba et partant. C’est une fois que l’appareil est entré dans le ciel aérien malgache qu’ils ont obtenu l’autorisation pour pouvoir atterrir à la dernière minute à Antananarivo, après des interventions. C’est pourtant un vol commercial avec des passagers à bord. C’est grave puisqu’on doit préparer l’assistance au sol, le handling…Il en est de même au niveau de la douane, de la police, il faut préparer l’arrivée du vol. Les passagers ne comprennent pas le pourquoi du comment avec l’attente de la PAF, de la douane, des bagages. Pour la pérennité de la compagnie nationale, on ne peut pas se permettre ce genre de chose.
A la signature du contrat avec Air Austral il y a plus d’un an, il y a une clause qui prévoit que pendant trois ans, on ne fait plus de code-share et on n’octroie plus de droit à quiconque. Autrement, cela va générer des chiffres d’affaires en moins. On aura une assemblée générale le 25 janvier prochain pour rendre les comptes, le quitus. On voit bien qu’on a une perte de chiffres d’affaires. Elle est due notamment au manque à gagner sur l’Airbus d’Air Madagascar sur Paris à cause d’Ethiopian Airlines et du dumping sur les prix. A l’époque un Airbus sur Paris faisait 65% du chiffre d’affaires de la compagnie nationale. C’est pour cela que nous nous battons pour la compagnie, pour sauver Air Madagascar. Après trois ans, l’État pourra accorder autant de vol qu’il le souhaite à Ethiopian Airlines. Nous avons prévu cette période pour nous remettre en condition pour s’apprêter à la concurrence d’ici trois ans. Le business plan doit être respecté pour qu’Air Madagascar retrouve ses fondamentaux.
MA-Laza : Jeudi dernier, le vol Fort-Dauphin/Antananarivo de la compagnie Tsaradia a été annulé après des heures d’attente des passagers qui n’ont pas manqué de faire part de leur grogne. Le vol a été reporté pour le lendemain. Que s’est-il passé réellement?
Eric Koller: Il y a eu des pannes techniques au niveau de l’appareil. En décembre dernier, on a eu un Boeing et deux ATR en panne dont l’un pour un problème de dégivrage. L’aspect sécurité chez Air Madagascar est très important. La ponctualité, la régularité et la sécurité sont vraiment importantes. Les commandants de bord sont vraiment très minutieux.
Dès qu’un avion tombe en panne, le programme de vol est chamboulé. Depuis que Tsaradia est là, on a 50% de vol en plus sur les provinces. Certaines provinces ont deux vols par jour et certains un vol quotidien. Avec les quatre ATR, c’est difficile de tenir cette cadence. A partir du mois de février, un cinquième ATR arrive pour renforcer la flotte. Si un avion est en panne sur une province, cet appareil pourra faire un back-up pour dépanner les passagers. Au lieu d’annuler un vol, les passagers auront une heure, deux heures de retard.
MA-Laza: Actuellement, qu’en est-il de la composition de la flotte de Tsaradia?
Eric Koller: Actuellement, la flotte de Tsaradia est composée de deux ATR 600, deux ATR 500 et deux twin-otter. Le Boeing 737-800 d’Air Madagascar renforce aussi la flotte de Tsaradia là où il peut aller c’est-à-dire à Nosy-Be, Tuléar, Fort Dauphin. Malheureusement, le Boeing ne peut se poser à Diégo pour des problèmes techniques ni à Sambava à cause de manque de camion-pompier qu’il faut régler rapidement pour le développement de Madagascar.
MA-Laza: En ce qui concerne les deux Airbus, pouvez-vous nous apporter plus de précisions sur le litige opposant Air Madagascar à Air France?
Eric Koller: Il y a un leasing qui a été payé par la compagnie nationale. Air Madagascar a assigné Air France au tribunal prévu à Paris au mois de février prochain. On verra par la suite les mesures à prendre si on perd et si on gagne. Il nous reste à payer le loyer et le leasing jusqu’à terme du contrat du premier Airbus et du second Airbus. On avait donné une réserve de maintenance à Air France au début du contrat. Il nous reste moins de 10 millions USD à donner à Air France. Il faut après qu’on travaille étroitement avec Air France pour trouver une issue à ce leasing. Nous ce qu’on demande ce sont les titres de propriété pour pouvoir devancer la fin du contrat. Ce qu’on aimerait c’est sortir les deux Airbus de la flotte d’Air Madagascar, ces appareils étant très chers à l’exploitation. On paiera jusqu’à la fin du contrat. Plus on va tarder moins on trouvera de compagnie qui voudra ces Airbus. C’est un contrat où on doit sortir gagnant-gagnant, de bonne foi. Air France et Air Madagascar devraient sortir la tête haute de ce contrat. C’est ce que l’on espère en tout cas.
MA-Laza : Votre mot de la fin?
Eric Koller : Tant que je serai là, on fera tout pour sauver cette compagnie avec le partenariat stratégique. C’est mon devoir en tant que PCA. Air Madagascar, c’est notre fleuron, notre porte-fanion national. Notre devise c’est de sauver la compagnie avec du travail et de l’intégrité.
Propos recueillis par C.R.
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