Mouton de Panurge
Voilà maintenant plusieurs mois que les députés, ceux qui viennent d’être élus, siègent à Tsimbazaza. La chambre basse, comme on l’appelle, est la première branche du Parlement, la seconde étant le Sénat qui doit encore attendre les résultats des municipales et communales, pour être mis sur pied.
En quelques mois d’existence, l’Assemblée nationale actuelle a déjà fait parler d’elle, en bien ou en mal. En bien d’abord, parce qu’elle est composée d’élus de tout bord, de l’opposition, de la mouvance présidentielle et d’indépendants. En mal ensuite, car pour certaines opinions, les parlementaires malgaches n’ont pas changé : comme des girouettes, elles tournent au gré du vent.
Si, pour la première fois, lors de la campagne législative, l’on a entendu des candidats parler de projets de loi, un des rôles des députés qui sont des législateurs, jusqu’à preuve du contraire, aucun n’a été présenté à Tsimbazaza. Ils sont enfermés dans les tiroirs du Bureau permanent, a-t-on entendu dire de la bouche d’un député… dépité. En outre, des débats, s’ils sont parfois houleux dans l’Hémicycle, bien peu concerne la vie quotidienne des 20 millions de malgaches. Tout tourne autour des intérêts et avantages des députés dans l’exercice de leur fonction : émoluments, indemnités de session, moyens de locomotion, tickets carburants, crédits téléphoniques, indemnités de représentation, indemnités de logement… et tout le tralala.
Pas une seule fois, un projet de loi du gouvernement n’a été refusé par les députés à Tsimbazaza. Tout passe comme une lettre à la poste. Les discussions ne sont qu’une facade pour montrer qu’ils sont là, répondant au rôle qui leur a été confié par le peuple. Certes, le débat concernant le projet de loi sur le statut particulier de certaines municipalités a été reporté. Mais c’était faute de temps et non pour approfondir et bien analyser cette proposition du gouvernement.
L’opinion attend un Parlement qui prend conscience de sa véritable fonction, là où les débats doivent s’élever et où l’argent ne serait qu’accessoire. Pas des députés qui caressent dans le sens du poil et qui font une liste des doléances de leurs électeurs mais des députés qui savent que le développement du pays n’est pas celui d’une seule région ou d’une seule circonscription et ne se limite pas à la construction d’un pont ou d’une piste. Il faut une vision plus globale, plus ouverte et basée sur le long terme. Il nous faut perdre cette habitude du pilotage à vue, des opérations « tip top », des inaugurations de toilettes publiques. Bref, il nous faut voir plus grand et sortir de ce cercle trop étriqué d’une Assemblée par trop égoiste et agissant en… mouton de Panurge.
