Les dons, parlons –en
Rien n’enchante les pauvres que nous sommes que les périodes électorales et les cataclysmes naturels comme ceux que nous vivons actuellement. Pourquoi ? Parce que, à ces moments là, les dons affluent, et généralement, ils sont gratuits.
Le rapport d’une ONG agissant dans les bas quartiers de la capitale prête à réfléchir. Celui-ci mentionne en effet que beaucoup de familles vivant dans ces lieux comptent souvent sur la période cyclonique pour constituer des stocks de PPN pour leur propre consommation dans l’année ou, bien souvent, pour les revendre. Plus la période est longue, plus ils gagnent. Et, généralement, il s’agit toujours des mêmes familles, des perpétuels sinistrés, en somme.
Un proverbe chinois dit qu’au lieu de donner du poisson à quelqu’un qui en demande, il faut lui offrir une canneà pêche. Ce proverbe pourrait s’appliquer chez nous. Car au fil du temps, il nous est de plus en plus difficile de réagir, habitués que nous sommes à tendre la main. Et de toujours attendre les secours au lieu de voir plus loin en pensant, par exemple, à ne plus être une victime consentante des cyclones et des inondations.
Malheureusement, même l’Etat donne cette image d’un éternel assisté. Nos gouvernants sont plus prompts à déclarer un état de sinistre plutôt que de chercher les moyens de l’éviter. Les cyclones, il y en a tous les ans. Et ils sont de plus en plus violents à cause du changement climatique. Mais notre BNGRC, le Bureau National de Gestion des Risques et des Catastrophes dont la mission, d’une manière générale, est d’assurer la prévention, les secours d’urgence et la réhabilitation après le passage d’une catastrophe, est-il bien armé pour l’accomplir ? Difficile d’y répondre, sauf qu’on sait que même les stocks pour les secours d’urgence ne suffisent pas et qu’il nous faut compter sur les dons des pays amis ou des largesses de particuliers pour pouvoir boucler la boucle.
Les donateurs agissent souvent par compassion, mais la plupart du temps, ils le font en escomptant un retour, pour ne pas dire un intérêt savamment calculé. Un politicien espère qu’un tee shirt offert à un potentiel électeur équivaut à une ou plusieurs voix dans les urnes. Une société qui offre des produits à des sinistrés fait de la publicité indirecte car les bénéficiaires ne manqueront pas de regarder leurs marques et, peut-être, plus tard, vont les vanter.
Il est malheureux que le pays doive, chaque année, payer une lourde facture des dégâts occasionnés par les cataclysmes naturels. Et de faire appel à la communauté internationale pour qu’elle vienne nous secourir. Mais depuis ce temps, avons-nous pensé à savoir limiter les dégâts et de réagir pour que les mêmes causes ne produisent plus les mêmes effets ? Rien qu’à voir les rues de la capitale, lesquelles, à chaque fin d’année, provoquent le tourment des usagers avec leurs nids de poule, il nous faut penser que nous sommes loin du compte. Car nous préférons les opérations « tip-top » au lieu de proposer, une fois pour toutes, des solutions qui nous épargneront de réserver un maigre budget à leur réparation, et éviter, comme c’est le cas actuellement, de polémiquer sur ceux qui doivent payer la facture. Donnons-leur… une canne à pêche !
