Conjoncture économique : “Plusieurs dangers nous guettent”, prévient Hugues Rajaonson

Conjoncture économique : “Plusieurs dangers nous guettent”, prévient Hugues Rajaonson

L’économiste Hugues Rajaonson nous a livré sa perception de cette année 2016 au cours d’une interview accordée à la Rédaction. Il a peur pour l’économie du pays, peur pour les Malagasy si les dirigeants ne changent pas leur façon.

MA-Laza : Comment percevez-vous cette nouvelle année 2016 ? Quelles sont vos éventuelles appréhensions ou vos attentes ?
Hugues Rajaonson : J’ai peur pour les Malgaches pour cette année 2016 puisque les conjonctures sont mauvaises. Sur le plan international, il ne faut pas minimiser le scénario selon lequel le prix du baril atteindra 100 USD en raison de ce qui se passe en Iran et en Arabie Saoudite.
Par ailleurs, d’après les projections de notre modèle macro-économique, Madagascar sera un pays déficitaire aussi bien en devises étrangères qu’en finances publiques. Pour éviter d’arriver à ce stade, il faut donner davantage de marge de manœuvre aux opérateurs privés. Il faut libéraliser l’économie malgache.
Actuellement, avec la situation qui sévit dans le pays, on n’a pas le droit de demander davantage de l’argent aux opérateurs malagasy.
A partir de 2016 jusqu’en 2023, si on ne fait pas attention, on ira dans une dépression profonde. Notre hypothèse c’est que les dirigeants qui sont au pouvoir actuellement resteront au pouvoir jusqu’en 2023.
Pour ce qui est du budget 2016, il n’y a pas de restructuration du système de production. Ceux qui sont au pouvoir ne devraient pas se contenter d’avoir obtenu la majorité durant les sénatoriales, il faut prioriser l’économie.

MA-Laza: Le Président de la République a annoncé dernièrement une hausse de 7,5% des salaires des fonctionnaires, quel pourrait être l’impact pour l’économie du pays?
Hugues Rajaonson: Cela empire la situation. Il ne faut pas oublier qu’une fois que l’on augmente le salaire des fonctionnaires, cela entraîne corrélativement une augmentation de la masse monétaire, et partant, une inflation. Le salaire augmente de 7% environ certes, mais selon nos calculs, la hausse du coût de la vie pourra atteindre les 21%.

MA-Laza: un phénomène qui inquiète également plus d’uns est la crise de la filière bovine. Qu’en pensez-vous?
Hugues Rajaonson: Il y a d’une part le phénomène «dahalo» et d’autre part les Chinois qui achètent les zébus à la source à des prix plus intéressants pour les éleveurs. Je crains que les Chinois donnent de l’argent à l’Etat malgache, défavorisant ainsi les opérateurs locaux. Cela ne se limite pas à la filière bovine, mais s’étend à d’autres secteurs comme celui des pierres précieuses. J’aimerai faire une interpellation. Comment contrôler l’aller et venue de ces étrangers?
Dans les pays développés qui accordent une importance majeure à la nutrition, la viande bovine coûte plus chère que la viande de porc. A Madagascar, ce n’est pas le cas. Il devrait y avoir une politique de l’élevage bovin, porcin, ovin…pour que les véritables acteurs du secteur puissent mener à bien leurs activités. Chez nous, quand on parle de «politique», peu importe le domaine ce sont les politiciens qui entrent en scène généralement alors qu’ils ne devraient pas s’immiscer dans le sujet.

Propos recueillis par C.R

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