Amoralité
Il n’y a vraiment plus de morale. Ce qui s’était passé hier à Ankorondrano est tout simplement scandaleux. Quand des gens sont venus au secours des accidentés, d’autres n’ont pensé qu’à faire les poches des victimes et de piller une des voitures en se mêlant aux secouristes. Il y en a même qui ont regretté d’être arrivés trop tard et de ne pas avoir eu droit à cette « manne ». Une attitude déplorable que seules la misère ou la pauvreté n’explique.
Car une semaine auparavant, à la sortie d’un spectacle gratuit à Antsonjombe, de jeunes gens, apparemment sobres et bien organisés, s’en sont pris à des automobilistes et à de simples spectateurs qui rentraient chez eux. Ils occupaient le milieu de la chaussée et choisissaient les voitures au hasard et attaquaient carrément les occupants, arrachant tout ce qui était visible et à portée de main : sacs, portables… Les plus audacieux cassaient même les vitres des voitures.
Ils sont une dizaine et se fondaient parmi la foule après leurs méfaits. Ils agisent à visage découvert et sont sûrs de leurs actions. D’ailleurs, personne n’a osé lever le petit doigt de crainte d’être pris ensuite pour cible ou d’être victimes de représailles immédiates. Il fallait être téméraire pour oser s’oposer à cette bande armée sûre d’une chose : l’impunité.
Depuis un certain temps, notamment lors des événements de 2009, quand personne n’a condamné les pillages et les saccages des magasins du Groupe Tiko ainsi que les grandes surfaces de la capitale, « voler » est devenu banal. Et même devant le juge, le prétexte est toujours le même : parce que je n’ai rien à manger, je n’ai pas de travail et de quoi nourrir ma famille etc… Le comble, c’est que la « majorité » compatit. L’on a toujours pitié des faibles qui deviennent des victimes, malgré leurs méfaits.
Bien peu seront convaincus, mais l’explication est à trouver dans la perte ou la dégénérescence de notre échelle de valeurs. C’est notre culture qui f… le camp parce que nous n’avons plus la volonté de la communiquer à nos progénitures. Le respect, la peur du « tsiny et du tody » ne sont plus que des mots vides de sens. On ne les apprend dans aucune école qui est d’ailleurs devenue un lieu où les élèves perdent leur identité : ils ne connaissent rien de l’histoire de Madagascar et maîtrisent plus le français que le malgache. Et là est tout le drame. Les concepteurs des programmes doivent admettre que les « Ohabolana », ces proverbes si riches et si profonds qui sont en eux-mêmes une initiation à la vie sociale ne s’expliquent et ne se comprennent dans une autre langue que le malgache. Le bien et le mal sont des notions qui s’acquièrent et se comprennent mieux dans la langue maternelle. Cette lacune explique l’amoralité ambiante actuelle.
