Quarante huit heures après une lettre de la Banque mondiale adressée au ministre de l’économie et des finances, relayée en large diffusion sur les réseaux sociaux, la classe politique et économique du pays est en ébullition. La lettre de rappel de Bretton Woods menace de suspendre son engagement financier d’un montant de 75 millions de USD visant à soutenir la compagnie JIRAMA dans le cadre d’un appui au développement face à la pandémie de la covid-19 d’une part et l’annulation d’un financement de 400 millions de USD du Programme pour Résultats (PforR) : « Gouvernance des Infrastructures et Connectivité Vitale ». La décision prise en conseil des ministres à la date du 20 janvier ordonnant à la JIRAMA de revoir son nouveau système tarifaire fraichement appliquée est la source de dissension. Pour la Banque Mondiale, il s’agit d’ « un retour en arrière sur une politique tarifaire déjà adoptée dans le cadre d’une aide budgétaire » et pour la partie malgache, de la défense du pouvoir d’achat des consommateurs déjà gravement effrité par la crise sanitaire et de contenir les risques d’une explosion sociale.
Certes, c’est un coup dur pour le gouvernement malgache actuellement en quête de financements pour son programme de développement PEM et d’investissements internationaux pour relever sa situation économique et sociale en régression. Le Premier ministre Christian Ntsay décideur des financements avec les partenaires internationaux, a du pain sur la planche face à cette menace réelle. Il ne faut pas oublier que le dysfonctionnement évoqué par la Banque mondiale qui engendrerait une déclaration de « non performance » du gouvernement reviendra à suspendre tous ses programmes, du moins pour un délai déterminé, et par ricochet les aides budgétaires dont l’Etat malgache bénéficie depuis des années.
Et cela peut aller encore plus loin et peut influer sur le financement du fonds monétaire international (FMI) à hauteur de 320 millions de USD actuellement sur la table du conseil d’administration de l’institution à Washington. En cas de défaillance de la partie malgache dans le traitement de ce dossier de la JIRAMA et de la mise en œuvre des réformes, la rétractation du FMI pourrait devenir une triste réalité. Cette institution a souligné le 12 février dernier que « le plan de redressement opérationnel et financier de la société publique d’électricité et d’eau JIRAMA sera mis en œuvre pour rendre l’entreprise viable sur les plans opérationnel et financier, réduisant ainsi le besoin de transferts publics ». Un passage qui démontre l’interdépendance et l’interconnexion entre le FMI et la Banque Mondiale en conditionnant leurs engagements dans le dossier JIRAMA.
Sans une prise en main rapide de l’exécutif, Madagascar pourrait revivre une situation similaire à celle de fin 2008. A l’époque, le FMI avait suspendu sa coopération avec la Grande Île et coupé le programme de facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance ou FRPC à cause de l’achat suspicieux d’un Boeing 737-600 destiné aux déplacements présidentiels. La rupture a couté cher aux Malgaches en plongeant son économie dans le chaos avec zéro investissement direct étranger et la fermeture de nombreuses industries. Il a fallu 8 ans pour rétablir les relations..
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