Passons aux choses sérieuses
La peur a plané sur la ville hier. Peur de ce qui allait se passer à Analakely, sur la Place du 13 mai, et peur de ce qui allait advenir après, tant les rumeurs d’un coup d’Etat se répandaient depuis que l’ancien N°1 de la Transition avait annoncé à Fianarantsoa que son retour au pouvoir était imminent. Tout le monde pensait à un remake des événements de 2009, avec leurs hordes de casseurs et d’incendiaires.
Finalement, il ne s’est rien passé, malgré que les commerçants d’Analakely et de ses environs aient pris leur précaution en entrebaillant leur porte ou en tirant carrément le rideau, une bonne partie de la matinée. La présence impressionnante des éléments des forces de l’ordre inversement proportionnelle au nombre des partisans des politiciens venus sur les lieux y est pour quelque chose.
La leçon à tirer de ce qui s’était passé hier est que mobiliser la foule en ce temps difficile relève de la gageure. Il faut des arguments solides et un ou des leaders autres que ceux qui se pavanent actuellement en tant que « représentants » du peuple. Quelqu’un de la stature des Richard Andriamanjato, avec sa verve, Didier Ratsiraka, avec sa vista, Marc Ravalomanana et sa réussite ou Andry Rajoelina et sa jeunesse. Les autres ne sont même pas des seconds couteaux mais plutôt des faire valoir.
Madagascar vient de sortir d’une longue crise. Pour d’autres, nous y sommes encore. Néanmoins, un Etat effectif et reconnu existe. Il a un programme et essaie de le réaliser. Pourquoi ne pas le laisser travailler, le laisser montrer qu’il est capable de faire quelque chose ? Et d’attendre les élections pour le juger ? De toutes les façons, depuis 1972, le peuple sait à quel moment le fruit est « pourri » et il sera là pour le faire tomber. Il est inutile de le pousser ou de l’inciter à se révolter. Même les arguments les plus aboutis, la réalité la plus évidente ne suffiront pour le faire descendre dans la rue, le seul moyen trouvé par les politiciens pour faire tomber un régime.
Pensons à autre chose, à quelque chose de plus sérieux à laquelle le peuple pourrait adhérer plus facilement. Mine de rien, mais l’exploit du groupe AmbondronA devrait faire réfléchir les politiciens et les sociologues. Ce groupe a rempli le Coliséum et plutôt deux fois qu’une. Et à chacun de ses concerts, les fans en ressortent satisfaits, plusieurs ayant même eu un orgasme, rien qu’en vivant en direct une ou plusieurs de ses chansons préférées. Le spectacle est payant et les « fans » savent d’avance qu’ils en auront pour leur argent. Le concert est sérieux, bien organisé… tous les ingrédients ont été réunis pour que tout le monde en ressorte gagnant. Les politiciens peuvent les imiter. Ils doivent savoir soulever les foules en proposant quelque chose dans laquelle ces derniers se reconnaissent. Non pas ces promesses mirobolantes comme lors des campagnes électorales, mais plutôt une campagne de séduction qui aboutirait à un mariage plus tard : celui du politicien et de ses « fans ». Réfléchissez-y.
