Un saut dans l’inconnu
Les députés ont osé franchir le Rubicon en engageant une procédure de déchéance contre le président de la République, pour avoir violé la constitution selon les uns, pour son projet de dissoudre l’Assemblée nationale, suivant les résolutions des Assises nationales qui ont reçu sa bénédiction, selon les autres.
Soit. Les résultats parlent d’eux-mêmes : 121 Oui pour la déchéance et 4 Non. Selon toute vraisemblance et contre toute attente, les députés TIM de Marc Ravalomanana ont également voté pour. Les USA se sont empressés de condamner cette décision des députés et ont brandi la menace de l’instabilité qui va s’ensuivre. Et en parlant d’instabilité, il est facile d’imaginer la cacophonie juridico-politique à laquelle s’expose le pays. Tout d’abord, qui va remplacer le président de la République si la Haute Cour Constitutionnelle valide ce résultat du vote ? La Constitution n’est pas explicite sur ce point. Si les uns parlent de la nomination du Premier ministre à la place du président, un contitutionnaliste rénommé évoque la gouvernance collégiale du gouvernement. Certains députés avancent, à leur tour, qu’ils peuvent également, suivant certaines mises au point, prendre la place des ministres et le président de l’A.N. serait nommé à la place de Rajaonarimampianina.
Ensuite, si tout va bien et que la Constitution est respectée, les élections devront se tenir le plus rapidement possible. Ce qui suppose une dissolution automatique des institutions, y compris l’Assemblée nationale. Autrement dit, certains de ces députés, même les signataires de la procédure de déchéance, courent le risque de ne plus être réélus. Mais le savent-ils ?
Et enfin, le pays va, une fois encore (une fois de trop) subir les contre-coups d’une crise politique dont on ignore l’issue. Combien d’années pour obtenir la reconnaissance internationale ? Combien d’années pour rétablir les relations et mener les négociations avec les baileurs ? Et, last but not least, où trouver l’argent pour subvenir au financement de ces élections ? Car, même les Nations-Unies n’accepteront plus d’être le dindon de la farce à tous les coups. Bref, nous allons effectuer un grand saut… dans l’inconnu.
