Le réseau de journalistes d’investigation « Malina » a enquêté sur des détournements d’argent et de violences sexuelles dans un milieu associatif. Il s’agit de « lieux de vie et d’accueil » gérés par l’association Manda Spring depuis 2008 qui reçoit de jeunes français de 14 à 21 ans, en difficulté familiale ou sociale, pour un séjour de rupture à Madagascar. Les deux sites de l’association sont basés à Ampahibato Alasora, commune rurale située au sud d’Antananarivo et à Antsirabe, dans une résidence sociale administrée par l’association.
Des signalements d’abus sexuels ont tout déclenché en octobre 2019, quand deux adolescentes françaises respectivement prises en charge par Manda Life et Manda Spring dénoncent auprès du Consulat de France des faits alarmants lors de leur séjour de rupture à Madagascar. Ces jeunes filles parlent de consommation de drogue, de relations sexuelles entre jeunes et adultes. Des révélations qui ont entraîné la décision de l’association mère Manda Life basée en France de cesser ses activités à Madagascar en janvier 2020, mettant ainsi fin à la collaboration avec les deux structures, Manda Life et Manda Spring.
Les deux jeunes filles reviendraient plus tard sur leurs déclarations, une fois revenues en France. Cependant, les témoignages d’anciens employés des sites malgaches confirment leurs dires et évoquent également des maltraitances sur des adolescents et des membres du personnel.
Au-delà de ces témoignages sur la maltraitance des pensionnaires, ce lieu de vie est aussi le théâtre de détournements de fonds. Une longue liste de dépenses injustifiées, d’un montant important était régulièrement débitée du compte bancaire de Manda Life à Madagascar, au crédit de l’association mère Manda Life.
Parmi les éléments de fraude, on cite par exemple dans le livre de compte de l’association des achats d’accessoires de maison auprès d’un grand magasin d’Antananarivo de l’ordre de 40 000 euros sur une année, au profit d’un orphelinat qui n’a jamais vu le jour et qui, d’ailleurs, à l’origine était censé être financé par les fonds privés du porteur du projet. Les recherches et audits effectués sur la liste des dépenses de l’association ont permis de préciser que ces fonds détournés ont servi à alimenter l’établissement d’un patrimoine immobilier privé au profit des dirigeants de la structure locale. Des indemnités kilométriques de 1600 à 1700 euros par mois sont facturées à l’association entre 2016 et 2017, ainsi que des indemnités de missions hebdomadaires, sans justificatifs clairs : ni reçus, ni factures. On y trouve aussi le financement par les fonds de l’association de projets économiques de ses leaders locaux, comme la mise en place d’un bassin piscicole, dissimulé en chantier solidaire. Enfin, la lecture des livres de compte fait état d’emplois fictifs au profit des membres de la famille des responsables locaux des deux associations, ainsi que de paiement de prestations mirobolantes à une autre association dont l’existence et les activités restent floues.
Recueillis par Velo Ghislain
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