Année 2015 : Vue par l’économiste Hugues Rajaonson

Année 2015 : Vue par l’économiste Hugues Rajaonson

 

Sans jouer les oiseaux de mauvaise augure, l’économiste Hugues Rajaonson voit plutôt en cette année 2015 de nombreuses facettes négatives. Interview.

Ma-LAZA: Comment concevez-vous cette année 2015?
Hugues Rajaonson : Selon notre projection, il y aura cette année une hausse de 3% an de masse de la population pauvre si aucun changement dans la conduite des affaires de l’Etat n’est opéré. Par ailleurs, nous commençons mal l’année avec toutes ces inondations et intempéries… J’espère que le gouvernement va tenir compte de tout cela, s’occuper de la population malgache et élaborer une politique de redistribution des revenus qui va assurer l’égalité de tous les Malgaches. Ce ne sera pas facile. Je crois que c’est à partir de 2016, 2017 que l’on pourra voir des résultats palpables. Cette année, nous devrions essayer. Avec un peu de bonne volonté, d’abnégation, l’on peut y arriver.

Ma-LAZA : Une mission du FMI est attendue dans nos murs vers mi-février. Que pensez-vous de cette institution ?
Hugues Rajaonson : Le FMI a changé complètement sa façon de voir les choses, sa façon d’intervenir. Il est temps que les Malgaches réalisent que le développement du pays revient aux Malgaches et non aux institutions financières. Je salue cette initiative du FMI qui est de dire que nous donnons de l’argent pour des projets bien précis. On verra si les Malgaches sont capables d’assurer le développement de la Grande île, d’utiliser à bon escient l’argent alloué à tel ou tel projet. C’est là que l’on pourra distinguer les bons politiciens et les bonnes politiques ainsi que la façon de faire les choses pour le bien de la nation.

Ma-LAZA : Une réunion des compagnies pétrolières avec les autorités de l’Etat s’est tenue en début de semaine. Comment percevez-vous le secteur pétrolier aval à Madagascar ?
Hugues Rajaonson : (…) Je pense qu’on peut maintenant envisager la vérité des prix du pétrole. Lorsque le prix sur le marché international baisse, le prix à la pompe devrait baisser également. Il faut prendre d’autres mesures, des mesures techniques. Nous avons, par exemple, des capacités de stockage insuffisantes pour assurer ces fluctuations-là. Mais il faut également que les Malgaches comprennent que s’il y a baisse des prix actuellement, l’on devra s’attendre à un retour de manivelle, avec des hausses. Donc, il faut éduquer la population dans ce sens-là, sur les éventuelles baisses et hausses de prix.

Ma-LAZA : Sur le plan monétaire, il y a ceux qui soutiennent que le Marché Interbancaire de Devises devrait être supprimé. Êtes-vous de cet avis ?
Hugues Rajaonson : Je crois qu’il y a beaucoup de questions de populisme. Il y a ceux qui ne croient pas que c’est à travers le MID que l’on peut voir la transparence des transactions de devises entre les Banques. Dire qu’il suffit de supprimer le MID pour contenir l’inflation est irraisonnable, si l’on peut dire. Il faut avoir une bonne politique monétaire. Si la Banque centrale a toutes les prérogatives par rapport à son indépendance dans la décision de toutes les politiques, je pense que tout ira pour le mieux. Il y a eu une intervention, récemment, pour que l’Ariary gagne en force. C’est une bonne chose si la Banque Centrale peut intervenir parfois pour que l’Ariary ne déprécie pas trop…

Ma-LAZA : Parmi les défis à relever pour cette année, figure l’augmentation des recettes fiscales. Comment pourrait-on y parvenir ?
Hugues Rajaonson : Il faut arrêter le harcèlement fiscal sur les entreprises malgaches. Elles ont toujours assuré les rentrées fiscales ! Maintenant, il faudra élargir l’assiette, faire payer ceux qui n’ont jamais payé, voire tous ceux qui ont des revenus et qui n’ont jamais payé une grande partie de leurs impôts. Il faut une stratégie précise et efficace en termes de moyens pour l’administration fiscale afin de parvenir à une fiscalité équitable.

Propos recueillis par C.R

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