Point de vue : On n’est pas si mal loti

On n’est pas si mal loti

Ceux qui ont eu l’occasion d’aller passer des vacances dans les autres villes de Madagascar comme Mahajanga, Toamasina, Antsiranana ou Toliary sont revenus da ns leur lieu de résidence, enchantés et impatients pour les prochains jours de congé. A Tana, il n’y a pas la mer, très peu de cocotiers, pas de mosakiky ou des soirées magnifiques sur le « bord ». Ils sont convaincus qu’ils vivent dans un beau pays et qu’ils n’ont pas encore tout découvert.
Nous quittons Tana pour oublier la saleté de la ville, les embouteillages, l’insécurité, les délestages… mais devons y revenir des souvenirs pleins la tête. Nous sommes déjà en grippe en remontant la falaise de la Mandraka ou celle de Mahatsinjo. Avons déjà mal à la tête en pensant que le lendemain ou dans quelques jours, nous devrons de nouveau affronter les réalités de la capitale. C’est vrai.
Mais avons-nous pensé que la vie c’est ça ? Nous ne pourrons jamais apprécier les plages du Grand Pavois ou celle de Ramena ou de Foulpointe si nous ne passons pas tous les jours auprès des eaux nauséabondes du Lac de Behoririka ou des odeurs pestilentielles du Canal Andriantany et des canaux d’Anosibe. Nous ne pourrons goûter aux charmes tranquilles des Pangalanes à Ambila ou Manambato si nous ne respirons pas tous les jours les fumées des pots d’échappement des taxi-be et de la pollution de la capitale. Eh oui. Le bonheur est à côté. Il nous suffit de pousser la porte.
Nous avons cette mauvaise habitude de dire du mal de notre pays et de « notre » vie en général. Mais sachez que, ailleurs, ils ne sont pas si bien lotis. Même dans les pays où nous croyons qu’il fait bien vivre, tout le monde a ses problèmes, peut-être encore plus tortueux que les notres. Là-bas, on peut se faire tuer au coin de la rue, on peut se faire agresser par n’importe qui, on peut ne pas avoir de perspectives d’avenir et, surtout, là-bas, on n’a jamais le soutien familial qui fait notre particularité à Madagascar.
Bien sûr, nous sommes encore pauvres. C’est clair, nous vivons dans un pays où rien ne semble marcher dans le bon sens. Mais est-ce que nous pouvons ressentir cela sans les images déformées des médias ? Pouvons-nous nous mettre dans la peau d’un Français ou d’un Anglais pour savoir ce que lui pense de la douceur de vivre ? De ses peurs et de ses angoisses ? Lui qui bénéficie des avantages d’une nation « civilisée », lui qui peut avoir tout ce qu’il veut… est-il heureux ?
Un manuel de Français intitulé « Madagascar, l’île heureuse » a disparu des librairies. Mais peut-être que le ministère de l’Education nationale peut toujours le dénicher et le remettre dans le programme scolaire. Au moins pour que tout le monde sache qu’il fait bon vivre chez nous. Qu’il suffit de peu pour trouver… le bonheur.

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