Point de vue :Une page de l’histoire tournée à jamais

Une page de l’histoire tournée à jamais

Et de deux : après Manjakamiadana, le Rova d’Ambohidratrimo disparaît à son tour de la même manière, par les flammes. Accident ? Incendie volontaire ? Une enquête est ouverte, mais, selon toute vraisemblance, tant dans les réseaux sociaux que dans les discussions dans la rue, l’opinion penche pour la seconde option. Il s’agit d’un incendie criminel.
Qui en seraient les auteurs ? Pour le moment, les enquêteurs ne privilégient aucune piste. D’ailleurs, s’il y en a, saurait-on un jour la véritable motivation des pyromanes ? Néamoins, un constat s’impose : c’est l’histoire de Madagascar en général et le passé historique Merina, en particulier, qui ont disparu sous les débris calcinés du Rova d’Ambohidratrimo.
Après les ressources naturelles, voici que nos richesses culturelles disparaissent une à une. Il ne reste plus que le Rova d’Ambohimanga pour justifier le passé de la royauté malgache. Et si, justement, ce que visaient les incendiaires ? Car, même si les malgaches cohabitent pacifiquement, il existe toujours des esprits chagrins qui en veulent aux « Ambaniandro » (autre appelation des Merina), responsables, selon eux, de la disparition ou de la déliquescence de leur royaume, avalé par l’hégémonisme des Andrianampoinimerina et des Radama. Les palais royaux symbolisaient cette ancienne puissance et leur disparition définitive, si elle n’efface pas l’histoire, allège au moins les rancoeurs.
Une autre piste peut mener vers les sectes qui voient en ces sites culturels et historiques des symboles du passé païen des Malgaches. Au même titre que les «Doany », lieux où on garde les reliques des rois, les palais royaux font l’objet de vénération et ceux qui les avaient occupés, jadis, sont parfois élevés au rang de Dieu. Et on connait le respect des Malgaches pour leurs ancêtres. Il n’y a pas qu’en Syrie ou en Irak que des extrêmistes détruisent ce qu’ils pensent contraire à leur « religion » et à leur « croyance ». La mainmise de certains « gourous » et autres « pasteurs » sur leurs adeptes est arrivée à un degré tel qu’il n’y a qu’un pas pour désigner ces sites historiques, devenus lieux de culte, comme des objets d’adoration diabolique condamnés à l’enfer des flammes.
Le Premier ministre en personne s’est déplacé, hier, à Ambohidratrimo. Preuve que le gouvernement ne prend pas à la légère cette tragédie. L’on souhaite que des éclaircissements soient apportés afin que la douleur de ceux qui ont perdu cet héritage culturel et historique soit moins légère.

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